Le Conseil et le Parlement parviennent à un accord sur l'interdiction des produits issus du travail forcé

Conseil de l'Union Européenne - 12/03/2024 09:15:00



De grands industriels du textile ont encore recours au travail forcé ici des ouighours dans un camp de travail


Le Conseil et le Parlement européen sont parvenus à un accord provisoire sur le règlement relatif à l'interdiction des produits issus du travail forcé sur le marché de l'UE. L'accord provisoire intervenu ce jour entre les deux colégislateurs soutient l'objectif principal de la proposition, qui est d'interdire la mise sur le marché de l'UE, la mise à disposition sur le marché de l'UE ainsi que l'exportation à partir du marché de l'UE de tout produit issu du travail forcé. L'accord apporte des modifications importantes à la proposition initiale, précisant les responsabilités de la Commission et des autorités compétentes nationales dans le processus d'enquête et de prise de décision.

Il est horrifiant qu'au 21e siècle, l'esclavage et le travail forcé existent encore dans le monde. Ce crime odieux doit être éradiqué, et la première étape en ce sens consiste à briser le modèle économique des entreprises qui exploitent les travailleurs. Par ce règlement, nous souhaitons faire en sorte qu'il n'y ait pas de place pour leurs produits sur notre marché unique, qu'ils soient fabriqués en Europe ou à l'étranger.

Pierre-Yves Dermagne, vice-premier ministre et ministre de l'économie et du travail de la Belgique
Base de données sur les zones et produits présentant des risques de travail forcé
Les colégislateurs sont convenus que, pour faciliter la mise en oeuvre du règlement, la Commission créera une base de données contenant des informations vérifiables et régulièrement mises à jour sur les risques de travail forcé, y compris des rapports d'organisations internationales (telles que l'Organisation internationale du travail). Cette base de données devrait soutenir les travaux de la Commission et des autorités compétentes nationales pour ce qui est d'évaluer d'éventuelles violations du règlement.

Approche fondée sur les risques
L'accord provisoire établit des critères clairs que la Commission et les autorités compétentes nationales doivent appliquer lorsqu'elles évaluent la probabilité de violations du règlement. Ces critères sont les suivants:

l'ampleur et la gravité du travail forcé présumé, y compris la question de savoir si le travail forcé imposé par un État peut être un sujet de préoccupation
la quantité ou le volume de produits mis sur le marché de l'Union ou mis à la disposition sur le marché de l'Union
la proportion des parties du produit final qui sont susceptibles d'être issues du travail forcé
la proximité des opérateurs économiques avec les risques de travail forcé présumé dans leur chaîne d'approvisionnement, ainsi que leur marge d'action pour y faire face
La Commission publiera des lignes directrices à l'intention des opérateurs économiques et des autorités compétentes afin de les aider à se conformer aux exigences du règlement, y compris des bonnes pratiques visant à supprimer différents types de travail forcé et à y remédier. Ces lignes directrices comprendront également des mesures d'accompagnement pour les micro, petites et moyennes entreprises, qui peuvent être mises à disposition par l'intermédiaire du portail unique sur le travail forcé.

Qui dirigera les enquêtes?
L'accord auquel les deux colégislateurs sont parvenus établit les critères permettant de déterminer quelle autorité devrait diriger les enquêtes. La Commission dirigera les enquêtes en dehors du territoire de l'UE. Lorsque les risques sont situés sur le territoire d'un État membre, l'autorité compétente de cet État membre dirigera les enquêtes. Si les autorités compétentes, lors de l'évaluation de la probabilité de violations du règlement, trouvent de nouvelles informations concernant le travail forcé présumé, elles doivent en informer les autorités compétentes des autres États membres, pour autant que le travail forcé présumé ait lieu sur le territoire de ces États membres. De même, elles doivent en informer la Commission si le travail forcé présumé se produit en dehors de l'UE.

L'accord intervenu ce jour fait en sorte que les opérateurs économiques puissent être entendus à tous les stades de l'enquête, le cas échéant. Il fait aussi en sorte que les autres informations pertinentes seront également prises en compte.

Décisions finales
La décision finale (à savoir celle d'interdire, de retirer ou de mettre hors circuit un produit issu du travail forcé) sera prise par l'autorité qui a dirigé l'enquête. La décision prise par une autorité nationale s'appliquera dans tous les autres États membres sur la base du principe de reconnaissance mutuelle.

En cas de risques d'approvisionnement de produits critiques issus du travail forcé, l'autorité compétente peut décider de ne pas imposer la mise hors circuit de ces produits, mais plutôt d'obliger les opérateurs économiques à retenir les produits jusqu'à ce qu'ils soient en mesure de prouver qu'il n'y a plus de travail forcé dans leurs activités ou leurs chaînes d'approvisionnement respectives.

L'accord provisoire précise que, si une partie du produit dont il a été établi qu'elle viole le règlement est remplaçable, l'obligation de mise hors circuit ne s'applique qu'à la partie concernée. Par exemple, si une pièce d'une voiture est issue du travail forcé, cette pièce devra être mise hors circuit, mais pas toute la voiture. Le constructeur automobile devra trouver un nouveau fournisseur pour cette pièce ou s'assurer qu'elle n'est pas issue du travail forcé. Toutefois, si les tomates utilisées pour fabriquer une sauce sont issues du travail forcé, toute la sauce devra être mise hors circuit.

Prochaines étapes
L'accord provisoire intervenu avec le Parlement européen doit à présent être approuvé et formellement adopté par les deux institutions.

Contexte
Environ 27,6 millions de personnes sont en situation de travail forcé dans le monde, dans de nombreux secteurs et sur chaque continent. Le travail forcé est le plus souvent présent dans le secteur privé, mais il est parfois imposé par les pouvoirs publics.

La Commission a proposé le règlement relatif à l'interdiction des produits issus du travail forcé dans l'UE le 14 septembre 2022. Le Conseil a adopté sa position de négociation le 26 janvier 2024.