La démocratie est en détresse, constate la Secrétaire Générale du Conseil de l'Europe dans son rapport annuel de 2021

Conseil de l'Europe - 13/05/2021 15:35:00

La Secrétaire Générale du Conseil de l'Europe, Marija Pejcinovic Buric, souligne « un recul clair et inquiétant de la démocratie » dans son rapport annuel sur la situation de la démocratie, des droits de l'homme et de l'État de droit dans les 47 États membres de l'Organisation.


« Dans de nombreux cas, les problèmes que nous constatons sont antérieurs à la pandémie de coronavirus, mais il ne fait aucun doute que les mesures légitimes prises par les autorités nationales pour faire face à la covid-19 ont aggravé la situation. Le danger est que notre culture démocratique ne s'en remette jamais complètement », a déclaré la Secrétaire Générale.

« Nos États membres doivent maintenant faire un choix. Ils peuvent continuer de permettre ou de faciliter le recul démocratique, ou ils peuvent oeuvrer de concert à inverser cette tendance pour renforcer et renouveler la démocratie européenne, et créer les conditions dans lesquelles les droits de l'homme et l'État de droit puissent s'épanouir.

« C'est le juste choix pour les 830 millions de personnes qui vivent dans l'espace du Conseil de l'Europe. »

Sur la base des conclusions de différents organes du Conseil de l'Europe, dont la Cour européenne des droits de l'homme, le rapport de la Secrétaire Générale examine l'évolution de la situation dans des domaines tels que les institutions politiques et l'indépendance de la justice, la liberté d'expression et d'association, la dignité humaine, la lutte contre la discrimination et la participation démocratique.

Le rapport encourage les États membres à tirer parti des mécanismes existants et futurs du Conseil de l'Europe pour relever de nombreux défis mis en évidence, sur la base des principes clés suivants :

les autorités nationales devraient revenir aux principes démocratiques fondamentaux et réaffirmer leur adhésion aux normes juridiques du Conseil de l'Europe, y compris l'exécution des arrêts de la Cour européenne des droits de l'homme ;
les États membres devraient adhérer pleinement au multilatéralisme incarné par le Conseil de l'Europe depuis plus de 70 ans ;
les restrictions et mesures imposées en raison de la covid doivent être non seulement nécessaires et proportionnées, mais aussi limitées dans le temps ;
les autorités nationales devraient se rallier à la culture démocratique et reconnaître les cas dans lesquels leurs déclarations, leurs actes ou leurs lois ont porté atteinte à cette culture en réduisant l'espace civique, en dissuadant ou en empêchant des individus, des associations et des ONG d'exercer leur liberté d'expression ou de réunion, ou en excluant des personnes d'une participation pleine et entière à la société.

Informations complémentaires

Voici quelques-uns des nombreux problèmes soulignés dans le rapport :

Liberté d'expression

- La plateforme du Conseil de l'Europe pour renforcer la protection du journalisme et la sécurité des journalistes a enregistré 118 cas d'atteintes à l'intégrité physique de journalistes dans toute l'Europe l'année dernière.

- Entre 2018 et 2020, la Cour européenne des droits de l'homme a conclu à la violation des dispositions de la Convention dans 237 affaires sur 263 relatives à la liberté d'expression.

- Des cas de blocage massif de sites internet ont été relevés également dans plusieurs pays.

Liberté de réunion

- De nombreux États membres ont imposé des restrictions à la liberté de réunion dans le cadre des mesures exceptionnelles prises pour limiter la propagation de la covid-19. De telles restrictions sont autorisées par la Convention européenne des droits de l'homme dans la mesure où elles sont légales, proportionnées à la nécessité de protéger la santé et la sécurité publiques, et non discriminatoires.

- Cependant, certains groupes, notamment de militants LGBTI, sont toujours confrontés à des restrictions plus générales de la liberté de réunion dans certains pays.

Droits des femmes

- La covid-19 a entraîné une régression de l'égalité entre les femmes et les hommes, faisant planer la menace d'un recul des droits fondamentaux des femmes et des filles et mettant particulièrement en relief les difficultés d'accès à une aide et à une protection auxquelles se heurtent de nombreuses femmes et le risque accru qu'elles encourent d'être exposées à la violence domestique ; de plus, les menaces et intimidations dans l'environnement numérique se sont multipliées ces derniers temps.

- Malgré son importance pour améliorer la protection des femmes contre la violence, la Convention d'Istanbul du Conseil de l'Europe et les droits qu'elle défend continuent de subir des attaques. Dans plusieurs pays, une vive opposition de certaines forces politiques et d'une partie de l'opinion publique s'est manifestée, motivée par des idées fausses ou des interprétations volontairement erronées quant aux potentielles implications de la Convention sur le plan juridique et social.

Lutte contre la discrimination

- La montée du discours de haine et des crimes de haine contre les Juifs, les musulmans, les Roms, les noirs et d'autres minorités, en particulier sur internet, met de plus en plus à l'épreuve les politiques de lutte contre la discrimination et en faveur de la diversité et de l'inclusion.

- Le discours de haine et les attaques contre des migrants se sont multipliés ces dernières années en réaction à un afflux de migrants en nette hausse en Europe depuis 2015, également à l'origine d'un soutien accru aux mouvements et partis politiques populistes et xénophobes.

Corruption et bonne gouvernance

- Dans certains pays, l'indépendance de la justice et son autorité en tant qu'arbitre équitable et impartial pour tous les citoyens ne sont toujours pas pleinement reconnues, ni garanties.