Les acteurs de la filière alimentaire sont mis au défi de réduire la teneur en sucre des aliments

OMS - Organisation Mondiale de la Santé - 08/12/2017 15:25:00

OMS-Europe. Dans une nouvelle étude, l'OMS cherche à savoir pourquoi les fabricants et d'autres acteurs de la filière alimentaire emploient du sucre dans les aliments et pourquoi ils l'emploient en si grandes quantités. Cette publication, intitulée « Incentives and disincentives for reducing sugar in manufactured foods: an exploratory supply chain analysis » (Mesures d'incitation et de dissuasion pour la baisse de la teneur en sucre : une analyse exploratoire de la chaîne d'approvisionnement), conclut que pour réduire la consommation de sucre, il est nécessaire d'adopter une approche globale, embrassant l'ensemble de la filière alimentaire.

L'OMS a produit ce rapport en réaction à la problématique toujours plus aiguë de la consommation excessive de sucres libres dans toute la Région européenne de l'OMS. Il existe un lien de cause à effet entre cette consommation et une prise de poids chez les adultes et les enfants.

Plus souvent incités que dissuadés de produire des aliments riches en sucre

Les principales sources de sucres libres dans l'alimentation européenne sont les boissons sucrées et les aliments qualifiés de « gâteries » (bonbons, chocolats, gâteaux, pâtisseries, biscuits...). Le terme « sucre libre » désigne tous les monosaccharides et disaccharides ajoutés aux aliments par le fabricant, le cuisinier ou le consommateur, ainsi que les sucres naturellement présents dans le miel, les sirops et les jus de fruits. Il n'englobe pas les sucres présents dans les fruits entiers ou dans les légumes.

Selon les recommandations de l'OMS, les sucres libres devraient représenter moins de 10 % de l'apport énergétique quotidien, tant pour les adultes que pour les enfants, et idéalement moins de 5 %.
Préparé en collaboration avec le Center for Food Policy (Centre pour la politique alimentaire) de City, University of London (Royaume-Uni), le nouveau rapport révèle qu'actuellement, bien plus de facteurs d'incitation poussent les producteurs et les détaillants d'aliments à forte teneur en sucre à continuer d'employer du sucre plutôt qu'à en limiter l'utilisation ou à le remplacer complètement.

Voici quelques-uns de ces facteurs d'incitation :
. la conviction que le sucre est l'étalon-or de la douceur ;
. le fait que le sucre est un ingrédient relativement bon marché, présent en abondance, et qu'on peut l'obtenir à partir de sources multiples ;
. l'accent mis par les fabricants et les détaillants sur le maintien de la compétitivité ;
. le désir des fabricants et des détaillants de continuer à donner le « choix » aux consommateurs qui veulent quand même acheter des aliments sucrés ;
. le fait que le sucre recèle des propriétés fonctionnelles essentielles pour les produits alimentaires industriels ;
. les inquiétudes des consommateurs concernant l'utilisation d'édulcorants artificiels.

À l'heure actuelle, les fabricants sont relativement peu incités à réduire la teneur en sucre des produits alimentaires industriels. Voici quelques facteurs d'incitation en ce sens :
. une sensibilisation croissante des consommateurs aux effets du sucre sur la santé ;
. des politiques et mesures gouvernementales visant à réduire la demande de sucre chez les consommateurs ;
. l'existence d'une gamme plus fournie d'édulcorants sans calories.

Adopter des politiques pour un rééquilibrage entre facteurs d'incitation et de dissuasion

Au départ de ces constats, le rapport passe en revue un large éventail de politiques que les pouvoirs publics peuvent adopter afin de favoriser les aliments sains en donnant aux fabricants et aux détaillants d'autres incitants en faveur d'une réduction de la teneur en sucre des aliments, et en aidant la population à opter pour des habitudes alimentaires saines. Ces politiques s'inscrivent dans la lignée des options stratégiques définies dans le Plan d'action européen pour une politique alimentaire et nutritionnelle 2015-2020 de l'OMS.

Le rapport envisage notamment les stratégies suivantes pour améliorer la qualité nutritionnelle de l'alimentation :
. des restrictions concernant le marketing de produits alimentaires auprès des enfants ;
. un étiquetage facile à comprendre pour le consommateur ;
. des politiques de prix ;
. des normes minimales pour les repas scolaires ;
. des stratégies ambitieuses pour modifier la composition des aliments.

« Il est évident que, d'un point de vue sanitaire, une action résolue est nécessaire pour faire baisser la teneur en sucre des produits alimentaires industriels en Europe », déclare le docteur João Breda, chef du Bureau européen de l'OMS pour la prévention et la maîtrise des maladies non transmissibles et chef de programme pour la nutrition, l'activité physique et l'obésité à l'OMS/Europe.

« Nous disposons déjà d'exemples encourageants de plusieurs pays européens qui ont démontré qu'il était possible d'engager les fabricants à réduire la teneur en sucre des aliments grâce à des objectifs précis assortis de délais et à un étiquetage explicatif sur le devant des emballages. D'autres ont eu recours à des législations telles que la taxation des boissons sucrées ou la restriction du marketing de produits riches en sucre auprès des enfants. »

Une nouvelle analyse pour inciter à poursuivre le débat et à prendre d'autres mesures

La nouvelle publication de l'OMS facilitera la mise en oeuvre des directives de l'OMS sur la consommation de sucres libres. Par ailleurs, elle fournit des arguments percutants qui justifient de mener d'autres études et de poursuivre le débat sur les politiques les plus efficaces en vue de transformer les systèmes alimentaires modernes pour une bonne santé.

L'OMS a présenté cette analyse aux États membres pour concertation lors du Colloque international pour des systèmes alimentaires durables au service d'une alimentation saine et d'une meilleure nutrition, qui s'est tenu à Budapest (Hongrie) les 4 et 5 décembre 2017 sur l'initiative conjointe de l'Organisation pour l'alimentation et l'agriculture des Nations Unies (FAO) et de l'OMS. L'OMS encourage vivement les pays à soumettre des commentaires et suggestions sur les constatations tirées de cette analyse.