Entretien avec Maurice Bandaman, Ecrivain et Ministre de la Culture et de la Francophonie de la Côte d'Ivoire

CIJF - Comité International des Jeux de la Francophonie - 26/07/2017 18:55:00


Ecrivain, romancier, dramaturge, Maurice Bandaman est Ministre de la Culture et de la Francophonie depuis 2012. C'est la plume et l'écriture qui le font connaître dans son pays.

Il a été lauréat du Grand prix littéraire d'Afrique Noire en 1993, et nominé au Prix RFI de 1998 pour sa pièce de théâtre "La terre qui pleure". De 2000 à 2004, il est Président de l'Association des écrivains de Côte d'Ivoire (AECI). Son action militante le conduit à s'engager en politique et Maurice Bandaman est nommé en 2012 Ministre de la Culture et de la Francophonie poste auquel, depuis lors, il est régulièrement reconduit. Son oeuvre est très variée. Elle comprend des romans, des pièces de théâtre et des recueils de poésie. Il vient de publier récemment «L'Etat Z'héros ou la guerre des Gaous» aux éditions Frat Mat Michel Lafon un roman dans lequel à travers des personnages imaginaires, il évoque l'histoire récente de son pays. Il nous reçoit sur le "Plateau" le haut Abidjan pour évoquer la dimension culturelle des Jeux d'Abidjan 2017

JF Puech : Abidjan accueille les 8èmes Jeux de la Francophonie, quel est le sens de cette grande manifestation pour la Côte d'Ivoire ?

Maurice Bandaman : Je voudrais évoquer ici ce que représentent les Jeux sous l'angle de la culture. C'est un honneur, un devoir, une fierté, que de recevoir à Abidjan les 8èmes Jeux de la Francophonie.

Les Jeux sont les seuls à présenter, à ce niveau de qualification, des concours culturels, parallèlement aux compétitions sportives. Cela donne un supplément d'âme à ce grand rendez-vous de la jeunesse francophone.

La Côte d'Ivoire présente 9 compagnies et groupes dans le domaine de la danse, de la jonglerie et de la chanson. Avec les représentants des arts classiques, la sculpture, la photographie, la peinture, la littérature, ce sont 33 Ivoiriens qui montent sur les planches et montrent leurs oeuvres aux jurys et au public qui les découvrira plus tard dans un nouvel écrin qu'est la Bibliothèque Nationale, entièrement rénovée aux normes internationales. La présence de tous ces artistes est un melting-pot de la création artistique. Les oeuvres d'artistes asiatiques trouvent des sources dans des inspirations de courants de l'Afrique. Le concret voisine avec le figuratif et parfois l'insolite. Tous les styles sont présents. Les sources voisinent et l'imagination jubile. Ce foisonnement en fait un immense kaléidoscope et une jouissance pour les sens.

Ce foisonnement comme je le disais, ainsi que la vie en commun au Village des Jeux est propice à des échanges, ne serait-ce qu'au sein même d'une délégation et par voie de conséquence à l'affirmation des valeurs de la Francophonie : solidarité, diversité, excellence. Ce ne sont pas de vains mots. Et pour nous les Ivoiriens, ces valeurs sont des références que nous ne devons pas oublier. Elles mettent au premier plan la nécessité et la richesse du "Vivre ensemble" qui font la cohésion d'une société, d'un pays.

JF Puech : Quelles sont les coopérations francophones dans le domaine de la culture qui ont été mises en place en Côte d'Ivoire ?

Maurice Bandaman : Elles sont de plus en plus nombreuses. La culture a ceci pour avantage qu'elle porte en elle naturellement, la collaboration, l'échange et la coopération. On y trouve les mêmes sources que celles des Jeux de la Francophonie. Et c'est le rôle de l'Etat de les faire fructifier. C'est ainsi que dans le cadre d'un traité d'amitié avec le Burkina Faso nous avons relancé les échanges culturels pour se faire rencontrer la connaissance de ces 2 peuples. Ainsi, le Festival du Balafon : un instrument mythique que le nord de notre pays, le Sénégal, le Mali, la Guinée et le Burkina Faso ont en commun, a été relancé. Le Balafon est un patrimoine culturel qui a sa sociologie, sa topologie, son mode de vie. Il est une voie du vivre ensemble et même une voie qui assure la cohésion des communautés de toutes ces régions. Cette particularité est si affirmée que cet art musical a été inscrit au patrimoine immatériel de l'UNESCO.

Au delà des accords qui nous lient dans des organisations régionales telles que, l'Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA), et la Communauté économique des Etats de l'Afrique de l'Ouest (CEDEAO) pour ce qui concerne les volets culturels, nous mettons en place des partenariats comme par exemple avec le Maroc dans le domaine du cinéma qui donnent lieu à l'organisation d'une année sur l'autre d'un festival du cinéma ivoirien à Rabat et vice versa.

Nous avons d'autres accords notamment techniques avec une préoccupation particulière pour la protection de ce que j'appelle des oeuvres de l'esprit, c'est à dire des droits d'auteurs. Dans un premier temps nous avons remis sur pied notre Bureau ivoirien des doits d'auteurs en collaboration avec la Sacem et l'Organisation mondiale de la propriété intellectuelle (OMPI). C'est en urgence que nous avons lancé à l'échelon francophone et du continent, le chantier de la protection numérique des oeuvres. C'est l'avenir des créateurs qui est en jeu. Si on ne réagit pas, l'exploitation indue des oeuvres prend de telles proportions que les artistes n'auront plus les moyens de vivre de leurs oeuvres et de leurs métiers.

JF Puech : La Côte d'Ivoire est à l'honneur de nombreux évènements culturels. C'est une année faste ?

Maurice Bandaman : Effectivement 2017 est une année exceptionnelle. Outre les Jeux de la Francophonie, la Côte d'Ivoire a accueilli la semaine dernière la Conférence des ministres de la culture de la francophonie. Nous avons été primés au Festival du Film panafricain de Ouagadougou en mars dernier et nous sommes invités d'honneur du Festival du Film francophone qui se tient dans un mois à Angoulême. La culture est une oeuvre de paix et il me plait de rappeler cette belle phrase du Président Houphouët-Boigny "La culture est au commencement et à la fin de l'action humaine"

Entretien avec Jean François Puech directeur de la Rédaction de l'agence NEWS Press
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