Résilience du chêne sessile

ONF - Office National des Forêts - 21/02/2017 08:50:00


Des chercheurs de l'Inra, en collaboration avec l'Office national des forêts (ONF) et des partenaires européens, ont mis en évidence une forte résilience du chêne sessile aux variations climatiques (températures et précipitations). Cette résilience globale masque cependant des réponses différentielles des populations selon leur origine. En réponse au changement climatique futur, la survie et la croissance des populations méridionales seront nettement plus affectées que celles des populations du nord de l'Europe. Ces travaux viennent d'être publiés dans la revue Global Change Biology.

Pour étudier les réponses du chêne sessile aux variations climatiques, les chercheurs de l'Inra, en collaboration avec l'ONF et des partenaires européens, ont analysé les données de survie et de croissance de l'espèce dans un réseau de plantations expérimentales installées il y a 30 ans dans plusieurs pays européens, depuis l'Angleterre et la Scandinavie jusqu'en Turquie.

Des populations issues de 116 origines géographiques avaient été transférées par plantation dans 23 forêts. Parmi ces transferts de populations, certains reproduisent spatialement des variations climatiques analogues à celles annoncées par les prédictions du GIEC (1). Ces plantations fournissent ainsi des éléments importants relatifs aux réponses futures du chêne sessile au changement climatique.

Les résultats montrent que, globalement, l'espèce manifeste une faible sensibilité aux variations climatiques. Le facteur qui génère les variations les plus importantes est le manque d'eau. On note par contre des réponses différentielles des origines géographiques : les populations venant de climats plus chauds ont une croissance inférieure à celles provenant de climats plus froids, montrant que le climat d'origine des populations a contribué à leur différenciation génétique perceptible aujourd'hui.

Les chênes du sud et de l'est de l'Europe menacés d'ici 2100

Ces données relatives à un climat contemporain, variable à l'échelle européenne, ont ensuite été intégrées dans des modèles incluant différents scénarios de hausse des températures d'ici à 2100. Les chercheurs ont ainsi déterminé les zones où la survie et la croissance du chêne sessile pourraient être limitées par le réchauffement à venir.

Face à un changement climatique modéré qui aboutirait à une hausse des températures de 1,8°C en moyenne d'ici 2100, l'espèce voit sa survie réduite au sud et à l'est de l'Europe. Les chênes sessiles situés dans le nord de l'Espagne, le centre et le sud de la France, le sud-est de la Serbie, l'ouest de la Hongrie, l'est de la Géorgie et le nord-ouest de la Turquie verraient leur croissance, voire leur survie, affectées. En revanche, les populations proches de la limite nord de la zone de distribution naturelle du chêne sessile bénéficieraient d'une croissance relativement plus rapide, notamment dans le nord-est de la Pologne, en Ecosse, dans le sud de la Norvège ou en Suède.

Ces phénomènes s'amplifieraient dans le cas d'un réchauffement climatique plus sévère, + 3,7°C en moyenne d'ici 2100.

Un dispositif expérimental inédit
Ce dispositif expérimental est inédit de par son ampleur et la longévité de l'expérimentation. Il a permis d'évaluer la résistance au réchauffement climatique d'une espèce forestière d'intérêt majeur au plan économique, écologique, et culturel et couvrant plus 1,5 millions d'hectares en France. La prochaine étape de cette expérimentation portera sur l'étude d'impact de l'augmentation de la saison de végétation selon les différentes origines (phénologie).

Ces travaux éclairent d'un jour nouveau la question de l'éventuelle migration assistée (2) du chêne, qu'il reste à modéliser plus précisément.

Ces travaux ont été cofinancés par trois projets européens de recherche sur l'adaptation des forêts au changement climatique : FORGER (www.fp7-forger.eu), TREEPEACE (www.treepeace.fr) et MOTIVE (motiveproject.net).

Un partenariat avec l'ONF gage de pérennité pour les sites d'expérimentations forestières Ces résultats, issus d'une véritable prouesse expérimentale vu la taille du dispositif et la durée, n'auraient pu être obtenus sans la collaboration de partenaires européens - au travers des soutiens financiers de l'Union Européenne - et la coopération de l'Office national des forêts (ONF) en France qui a accueilli 4 plantations comparatives de chêne sessile dans quatre forêts domaniales de 19 à 40 ha chacune : La Petite Charnie (Sarthe), Vierzon (Cher), Sillégny (Moselle) et Vincence (Nièvre).

Les essais installés dans ces forêts publiques, constituent un gage de pérennité pour ce type d'expérimentation sur le long terme. Au travers d'une convention avec l'Inra, l'ONF soutient ce projet financièrement et avec l'appui de son personnel du département recherche développement et innovation qui participe depuis le début aux campagnes de mesures.

(1) Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat qui a défini 4 scénarios représentatifs de l'évolution de la concentration en gaz à effet de serre dans l'atmosphère pour le XXIe siècle et au-delà. Pour chacun des scénarios les climatologues déduisent les conditions climatiques et les impacts du changement

(2) Unité mixte de recherche « Biodiversité, Gènes et communautés » (Biogeco) Département « Ecologie des forêts, prairie et milieux aquatiques » (EFPA) Centre Inra Bordeaux-Aquitaine