France Stratégie : Première évaluation d'envergure du Plan France Très haut débit

France Stratégie - 02/09/2020 10:45:00

Pendant la difficile période de confinement que nous venons de vivre, l'accès à Internet et la robustesse des réseaux de télécommunication ont permis de maintenir une part de l'activité économique et une certaine forme de vie sociale. Télétravail, télémédecine, continuité pédagogique, aucun de ces usages n'aurait été possible sans une connectivité et des réseaux résilients et performants en qualité, en débit et en couverture.

Mais cette période a également été révélatrice d'inégalités d'accès à ces services selon les territoires, le niveau d'équipement ou d'acculturation au numérique de nos concitoyens. Le Plan France Très Haut Débit (PFTHD), initié en 2013 par le gouvernement, vise à couvrir d'ici 2022 l'intégralité du territoire en très haut débit. Pour atteindre cet objectif, des financements privés et publics (Etat et collectivités locales) sont mobilisés. Le gouvernement a confié à France Stratégie la mise en place d'un programme d'évaluation du Plan France Très Haut Débit. Ce programme piloté par Pierre-Jean Benghozi, appuyé par un conseil scientifique a pour objectif d'évaluer les impacts socioéconomiques ex post du plan. Le premier rapport du conseil scientifique dresse un état des lieux de la littérature sur l'impact des réseaux très haut débit sur les indicateurs macro-économiques et présente la méthodologie de l'évaluation ex-post qui a été choisie.


LE RAPPORT D'ETAPE SUR L'évaluation socio-économique du Déploiement du très haut débit et du Plan France très haut débit
EN SAVOIR PLUS lire LE PREAMBULE DU RAPPORT Conseil scientifique présidé par Pierre-Jean Benghozi et Anne Faure Rapporteur



Rares sont les innovations technologiques porteuses de transformations aussi profondes que celles qu'ont permises l'industrie des télécoms et le numérique ces trente dernières années. Quelle meilleure preuve aurait-on pu en trouver que les extraordinaires solutions rendues possibles grâce aux télécommunications pendant les dramatiques périodes de confinement pour maintenir activité économique et vie sociale ?

Télétravail, réunions à distance en visioconférence, loisirs et accès aux contenus culturels, télémédecine et applications sanitaires... Aucun de ces usages n'aurait été possible sans une connectivité et des réseaux résilients et performants en qualité, en débit et en couverture. Cette amélioration de la capacité des réseaux s'est opérée en plusieurs étapes. La reconfiguration de l'industrie des télécoms dans les années 2000 puis l'amélioration considérable des débits ont favorisé l'arrivée de nouveaux entrants, de nouveaux modèles d'affaires, de nouvelles formes d'entreprenariat portées par les « Big Tech » et les startups. Loin de se cantonner aux seules « industries du numérique », tous les secteurs d'activité sont concernés par ces évolutions comme le notait le Conseil d'analyse économique (CAE) dans une note de 20151. Au contraire le numérique bouscule toutes les sphères de la société, le développement des entreprises et leur modèle d'affaire, l'organisation du travail et de l'emploi, y compris l'action de l'État dans son rôle d'investisseur, dans l'exercice de ses compétences régaliennes ou dans ses capacités à réguler les marchés et à organiser la concurrence. Le déploiement de réseaux de télécommunication efficaces et durables constitue de ce fait un enjeu à la fois national et pour chaque territoire.


À l'échelle du pays tout entier, c'est une condition nécessaire au développement économique des entreprises et à la cohérence de la Nation. À l'échelle locale, le très haut débit contribue à la réduction des inégalités territoriales et répond aux besoins de transformations souhaitées par la société civile : sociabilité et meilleur accès à l'éducation et la culture, à l'emploi, à la formation, et plus généralement aux services publics.


Cette révolution des usages est déjà engagée. Aujourd'hui la majorité des foyers français fait un usage régulier d'Internet (85 % de la population se connecte au moins une fois par semaine). 71 % d'entre nous utilisent les réseaux fixes pour regarder la télévision et 33 % ont, au cours des douze derniers mois, regardé la télévision de rattrapage (replay) sur un téléphone, une tablette ou un ordinateur1. Et encore, ces chiffres ne tiennent-ils pas compte de l'intensification des usages qu'a créée la période de confinement.

Pour être massive, cette adoption des services de communications électriques masque pourtant des disparités qui ne peuvent qu'interpeller l'action de la puissance publique. Une proportion importante du territoire ne dispose toujours pas d'un accès satisfaisant à Internet2 car seuls 61 % des ménages français ont accès à du très haut débit3. Beaucoup d'élus locaux s'alarment de cette situation car ils ont acquis la conviction que l'arrivée de la fibre et du très haut débit dans leur localité est le gage de l'attractivité de leur territoire et l'avenir du développement local.

La pression des territoires et des populations, exercée sur les gouvernements successifs pour bénéficier du Très Haut débit (THD), s'est donc logiquement intensifiée. En l'absence d'infrastructures de télécommunication aux performances uniformes sur le territoire, les habitants comme leurs représentants s'inquiètent d'un décrochage économique et démographique de leur territoire et expriment un sentiment de relégation. La couverture numérique est devenue un enjeu politique et social dont les effets sont directement observables dans les résultats électoraux, voire dans certains mouvements sociaux.

La situation n'est pas radicalement nouvelle. Dès le début des années 2000, l'État et les collectivités territoriales avaient choisi d'accompagner la transformation numérique et réalisé d'importants investissements pour l'aménagement numérique. Mais aujourd'hui, l'ambition est double. Elle touche d'une part l'accélération des déploiements et de la couverture en s'appuyant sur une technologie prometteuse, la fibre, pour garantir un « bon » haut débit pour tous d'ici fin 2020 et le très haut débit pour tous d'ici fin 2022. Il s'agit, d'autre part, de voir se développer des usages nouveaux pour garantir à tous et partout sur le territoire un égal accès à la santé, à l'emploi, à la mobilité, à l'éducation, à la culture, etc.

1 « Baromètre du numérique 2018 », Sourcing Crédoc N°Sou2018-4439, décembre 2018. 2 « On désigne un accès Internet "haut débit" lorsqu'il permet d'offrir un débit inférieur à 30 Mbits/s, un accès Internet "très haut débit" lorsqu'il permet d'offrir un débit supérieur à 30 Mbits/s. Le "très haut débit" est atteignable par différentes technologies : le réseau en cuivre, le câble coaxial, certains réseaux radio, et la fibre optique jusqu'à l'abonné (FttH). » Source : Arcep. Un bon haut débit, descendant de 8 Mbit/s permet par exemple de télécharger une page web sur un site (250 kB), en 0,3 seconde, un morceau de musique (5 MB) en 5 secondes, un film en qualité DVD (4GB), en 1 heure et 11 minutes. Source : Institut belge des services postaux et des télécommunications. 3 Arcep (2020), « La régulation de l'Arcep au service des territoires connectés », rapport d'activité


Ces ambitions se sont concrétisées dans le Plan France Très Haut Débit (PFTHD), lancé en 2013 par le gouvernement pour « fortifier le tissu des entreprises françaises [...], favoriser l'émergence de leaders mondiaux, mais aussi faire en sorte que tous les acteurs de l'économie s'approprient le numérique [...] ». L'accès pour tous et sur l'ensemble du territoire à l'Internet Très Haut Débit (THD) doit favoriser l'adoption du numérique dans toutes les couches de la société et offrir « des instruments pour mieux apprendre, mieux travailler, mieux se soigner [...] participer à la vie démocratique [...] »1.

Depuis cette date, les gouvernements successifs ont réaffirmé leur engagement en faveur du Plan en stabilisant le cadre financier, réglementaire et fiscal indispensable pour sécuriser l'engagement des investisseurs et des opérateurs mais aussi pour assurer un développement équilibré sur tout le territoire national. Pour ce faire, le Plan cible notamment les zones moins denses2 du territoire en complémentarité des zones sur lesquelles les opérateurs privés se sont engagés à déployer leurs réseaux optiques.

Il vise à soutenir les projets des collectivités locales métropolitaines ou ultra-marines, situés hors des zones d'initiatives privées. Le PFTHD intervenant dans un secteur concurrentiel et ayant vocation à soutenir des projets impliquant des entreprises privées, a été notifié à la Commission européenne afin que celle-ci puisse s'assurer de sa compatibilité avec le Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (TFUE, article 107, paragraphe 3, point c) définissant le régime des aides d'État. La Commission européenne (CE) a confirmé une telle conformité du PFTHD au regard du droit européen en matière d'aides d'État (AE), dans une notification publiée en 2016 (SA.37183 2015 NN). Comme c'est en général le cas, cet accord s'accompagne d'un engagement à établir un programme d'évaluation dont les objectifs sont précisés dans le chapitre IV.2. Cette évaluation socioéconomique ex post du déploiement du THD ne doit pas se limiter à une analyse strictement économique. Si le régime d'aide d'État autorise l'intervention publique là où les opérateurs sont défaillants, c'est bien qu'ils sont dans l'incapacité d'investir mais aussi d'offrir un niveau de service satisfaisant aux consommateurs. C'est pourquoi l'enjeu d'une évaluation du Plan doit être bien plus large que le seul constat d'une carence économique de marché (absolue ou relative, lorsque par exemple les caractéristiques de l'offre privée ne satisfont pas les objectifs du service public : universalité, accessibilité, qualité...) et de la pertinence générale de l'intervention publique. Il doit s'agir aussi de jauger le bénéfice social de l'arrivée des réseaux THD et de la fibre au sein de chaque ménage, dans les territoires, dans les entreprises.

1 Séminaire gouvernemental sur le numérique présidé par le Premier ministre, Gennevilliers (Hauts-de-Seine), le 28 février 2013. 2 Décision de l'Arcep n° 2009-1106 et n° 2013-1475


Le gouvernement français a choisi de confier cette mission d'évaluation à France Stratégie par la lettre de saisine qui lui a été adressée le 16 avril 2019 (Annexe 1). France Stratégie m'a confié le pilotage scientifique de cette mission d'évaluation et j'ai souhaité réunir autour de moi un conseil scientifique, composé d'une dizaine d'experts français et européens, aux compétences variées, et qui m'accompagnent dans ces travaux. Réuni pour la première fois, en juin 2019, ce conseil a depuis défini la méthode qui sera suivie pour conduire ce programme d'évaluation et a engagé les premières actions, que ce rapport a vocation à présenter. À ce stade, ce rapport n'a naturellement pas l'ambition de dresser des conclusions qui ne devraient être disponibles, pour les premiers d'entre eux, qu'au dernier trimestre de 2020. Il permet cependant de présenter déjà les premiers résultats de dix mois de travail : - le contexte français et européen de l'évaluation du Plan ; - un état des connaissances académiques sur les effets socioéconomiques ex post du déploiement des réseaux ; - l'état d'avancement des premiers travaux de recherche qui sont engagés dans le cadre du programme.
Pr. Pierre-Jean Benghozi Président du conseil scientifique Directeur de recherche au CNRS Professeur à l'École polytechnique et à l'université de Genève


Matthias Le Fur
Directeur du service édition-communication-événements
+33 (1) 42 75 61 37
matthias.lefur@strategie.gouv.fr

Charlotte Cougny
Chargée des relations presse
+33 (1) 42 75 60 39
+33 (6) 72 31 33 14
charlotte.cougny@francestrategie.eu


Les grandes dates de l'histoire économique et financière de la France


France Stratégie



18 rue de Martignac
75700 Paris cedex 07



Matthias Le Fur
Directeur du service Edition/Communication

France Stratégie – Services du Premier Ministre
Tel 01 42 75 61 37
matthias.lefur@strategie.gouv.fr



Gilles de Margerie
Commissaire général