Jules Adler. Peintre du peuple, jusqu'au 20 février 2020

MAHJ - Musée d'Art et d'Histoire du Judaïsme - 09/12/2019 11:25:00


Avec près de 200 peintures, dessins, gravures et documents, cette exposition est la première rétrospective consacrée à un artiste qui laisse une oeuvre puissante sur les bouleversements de son temps.
Né en 1865 à Luxeuil-les-Bains en Haute-Saône, au sein d'une modeste famille juive, Jules Adler est un peintre de la seconde génération naturaliste, dans la lignée des peintres de la réalité initiée par Gustave Courbet (1819-1877), franc-comtois lui aussi.

Dreyfusard de la première heure, l'artiste développe une vision du monde proche de celle d'Émile Zola (1840-1902), s'intéressant aux différentes figures du peuple : des ouvriers des manufactures et des mines aux petits métiers parisiens, des déracinés des villes aux paysans et marins, hommes, femmes, enfants ou vieillards partageant, sinon un même destin, une forme de relégation.

Après Dole, Évian, Roubaix, cette première rétrospective fait redécouvrir à Paris l'oeuvre d'un artiste injustement méconnu bien qu'une de ses toiles, La Grève au Creusot (1899), soit devenue une icône des luttes ouvrières. Auteur d'une oeuvre d'une grande force - notamment dans la première partie de sa longue carrière -, Adler a été largement reconnu en son temps, mais son indifférence aux débats des avant-gardes artistiques et son intérêt croissant pour le monde rural l'ont desservi auprès des générations suivantes. Au mahJ, l'exposition s'arrête aussi sur les résonances de la judéité du peintre dans sa perception du monde et ses engagements d'homme et d'artiste.

Commissaires
Commissaires : Amélie Lavin (directrice du musée des Beaux-Arts de Dole) ; Claire Decomps (conservatrice en chef chargée des collections historiques et des judaica au mahJ), assistée de Virginie Michel (mahJ)

Publication
Jules Adler, 1865-1952. Peindre sous la Troisième République
240 pages, 24 × 28 cm, 25 euros Silvana Editoriale, 2017
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PLUS D'INFO

Né à Luxeuil-les-Bains en Franche-Comté, au sein d'une famille juive d'origine alsacienne, Jules Adler (1865-1952) est un peintre de la seconde génération naturaliste, à l'origine d'une oeuvre aussi forte que singulière. Il est aujourd'hui peu connu du public, bien qu'une de ses toiles, La Grève au Creusot (1899), soit devenue une icône des luttes ouvrières reproduite sur nombre de livres d'histoire. A travers 170 peintures, dessins, gravures et documents - pour près d'un tiers jamais présentés au public -, cette rétrospective permet de découvrir une oeuvre originale et de comprendre son inscription dans le contexte social et politique de la France de la Troisième République.

Elle offre aussi l'occasion d'aborder les résonances de sa judaïté dans sa perception du monde et ses engagements d'homme et d'artiste. Dreyfusard et grand admirateur d'Émile Zola, Jules Adler est surtout préoccupé, au début de sa carrière, par la misère et la dureté de la société industrielle triomphante, s'intéressant autant à la condition ouvrière (Les hauts-fourneaux de la Providence, Les Enfourneurs, Au pays de la mine...) qu'au petit peuple des villes, notamment Celui de Paris où il vit (Les Las, La soupe des pauvres...), ce qui lui vaut le qualificatif de peintre « des humbles ».

Il laisse ainsi l'une des oeuvres les plus fortes sur les luttes sociales et le prolétariat à la fin du XIXe et au début du XXe siècle. S'il aborde ensuite des sujets moins radicaux, il demeure attaché aux figures populaires et se tourne vers les campagnes, basculement qui s'affirme après le traumatisme de la Grande Guerre au cours de laquelle il est envoyé en mission sur le front, témoignant par ses photographies et ses croquis de la désolation générale. Adler parcourt alors de nombreuses régions, dépassant le pittoresque pour s'intéresser aux hommes, femmes et enfants qu'il rencontre, des matelotes d'Étaples, dans le Nord, guettant le retour de leurs maris pris par la tempête aux paysans francs-comtois occupés aux travaux des champs.

Il n'aura de cesse de poursuivre dans cette veine, y compris lors de son internement en 1944 à l'hospice de la rue Picpus à Paris, devenu camp d'internement pour les vieillards et les malades juifs en attente de déportation, au cours duquel il réalise de nombreux dessins.