15 ans d'évolution de la sinistralité au travail en France : les inégalités entre les hommes et les femmes persistent

ANACT - Agence nationale pour l'amélioration des conditions de travail - 12/12/2018 10:50:00

L'Anact actualise chaque année, depuis 2012, une analyse des accidents du travail, de trajet et des maladies professionnelles pour les femmes et pour les hommes, réalisée à partir des données de sinistralité de la Caisse Nationale de l'Assurance Maladie (CNAM). Cette étude quantitative met en lumière l'évolution sur 15 ans (entre 2001 et 2016) des écarts entre les femmes et les hommes en matière de santé au travail en France.

Les résultats en détail.

Une photographie statistique selon le sexe, par risque et par branche d'activité

L'étude réalisée par l'Anact met en évidence les différences d'évolution de la sinistralité au travail selon le sexe méconnues. La baisse globale des accidents du travail depuis 2001 masque ainsi la progression des accidents du travail pour les femmes. Par ailleurs, les accidents de trajet, en baisse pour les hommes depuis 2001, sont en hausse pour les femmes.

Et si la progression des maladies professionnelles concerne tant les femmes que les hommes, elle est deux fois plus rapide pour les femmes depuis 2001.

D'autre part, l'analyse par branche d'activité montre que les écarts d'évolution de la sinistralité pour les femmes et pour les hommes, sont en tendance plus importants dans les secteurs mixtes ou à prédominance féminine en croissance d'effectifs.

La baisse globale des accidents de travail avec arrêt depuis 2001 masque la hausse significative des accidents du travail pour les femmes

En 2016, les accidents du travail, déclarés et reconnus, concernent deux fois plus les hommes que les femmes. Les accidents du travail avec arrêt touchent nettement plus les hommes (64%) que les femmes (36%).

Pourtant, si les accidents du travail avec arrêt, déclarés et reconnus, baissent globalement entre 2001 et 2016, ils progressent pour les femmes. En 15 ans, ils ont augmenté de +30,5% pour les femmes tandis qu'ils ont baissé de -29% pour les hommes.

Les accidents de trajet avec arrêt en baisse pour les hommes, en progression pour les femmes depuis 2001

Le nombre d'accidents de trajet, déclarés et reconnus, a diminué depuis 2001 pour les hommes et progresse pour les femmes. Entre 2001 et 2016, ils ont baissé de -13,3% pour les hommes et augmenté de +18,6% pour les femmes. En 2016, le nombre d'accidents de trajet des femmes dépasse légèrement celui des hommes aujourd'hui. Ils concernent un peu plus les femmes (54%) que les hommes (46%).

Les maladies professionnelles reconnues progressent près de deux fois plus rapidement sur cette période pour les femmes que pour les hommes

Les maladies professionnelles, déclarées et reconnues, ont fortement augmenté pour les femmes et les hommes (+101,3%) depuis 2001. Pour les hommes, on constate également une augmentation des maladies professionnelles (+71,5%), sur la même période, moins forte que pour les femmes (+145,2%). Les maladies professionnelles, déclarées et reconnues, concernent quasiment autant les hommes (51%) que les femmes (49%).

Les branches d'activités les plus accidentogènes en 2016

En 2016, les services de santé, action sociale, nettoyage et travail temporaire et les services, commerces et industries de l'alimentation continuent à enregistrer le plus d'accidents de travail avec arrêt pour les femmes.

Le BTP et les industries transports, eau, gaz, électricité comptabilisent le plus d'accidents du travail avec arrêt pour les hommes.

En 2016, les deux branches d'activités qui concentrent le plus d'accidents de trajet concernant des femmes sont les services, santé, nettoyage et travail temporaire et les secteurs de la banque, assurances et administrations.

Pour les hommes, ce sont les secteurs des services, commerces et industries de l'alimentation et ceux de la santé, action sociale, nettoyage et travail temporaire qui comptent le plus d'accidents de trajet.

En 2016, les branches d'activités qui totalisent le plus de maladies professionnelles pour les femmes sont encore les services, commerces, et industries de l'alimentation ainsi que les services, santé, action sociale, nettoyage et travail temporaire.

Pour les hommes, ce sont les secteurs du BTP et de la métallurgie.

Prendre en compte les conditions d'exposition différenciées des femmes et des hommes

Les femmes et les hommes ne sont pas répartis également selon les branches d'activités : certaines sont à prédominance féminine, masculine ou mixte. Ainsi les activités de services : santé, nettoyage ; travail temporaire (branche I) qui recouvrent la plus grande croissance d'effectif et où l'on observe le plus grand écart entre les tendances d'évolution de la sinistralité pour les femmes et pour les hommes Au-delà des secteurs, il existe aussi une répartition sexuée des emplois, et pour un même emploi, il peut exister une répartition sexuée des activités.

L'Anact fait l'hypothèse que, depuis 2001, les femmes occupent des postes dont les activités sont exposées à des risques insuffisamment identifiés et reconnus, et ce, d'autant plus, pour les secteurs à prédominance féminine. Une telle hypothèse réinterroge alors la capacité d'adaptation et d'efficacité des politiques d'évaluation et de prévention des risques puisqu'elles, ne s'adressent pas aux femmes dans leurs emplois alors que c'est le cas des hommes.

La prise en compte des conditions d'exposition différenciées des femmes et des hommes permet alors de progresser dans l'évaluation et la prévention des risques professionnels.

En mobilisant ce regard différencié sur les situations de travail des femmes et des hommes, les politiques de santé et sécurité au travail pourraient faire progresser la prévention de la sinistralité pour toutes et tous au travers de pistes d'action préconisées dans la "Photographie statistique des accidents de travail, des accidents de trajet et des maladies professionnelles en France selon le sexe entre 2001 et 2016" réalisée par l'Anact.