Discours au débat 2017 CPME

Blog de François Fillon - 06/03/2017 21:45:00



Monsieur le Président, Mesdames, Messieurs,

Mon objectif : c’est faire que dans 10 ans la France soit la première puissance en Europe. Ce but est atteignable si on passe à la vitesse supérieure pour la croissance et pour le plein emploi.

Pour cela, il faut changer de logiciel : plutôt que de surcharger nos entreprises de normes et de charges, il faut oser la liberté ; plutôt que d’encadrer à l’extrême le travail, il faut oser le libérer.

Nous avons trop longtemps oublié qu’avant de dépenser, de prévoir de nouvelles aides, de lever encore et encore des impôts, avant de multiplier les directives, il fallait faire confiance aux individus, à leur énergie, aux entreprises.

Bref, on a oublié qu’il n’y a pas de progrès sans produire, travailler, innover, créer des richesses.

Ça n’est pas facile de défendre cette position de bon sens dans un pays si longtemps accoutumé à tout encadrer, comme s’il valait mieux l’uniformité que l’audace.

Mais avec 6 millions de personnes qui pointent à pôle emploi et 2200 milliards de dettes, on a maintenant pas d’autre choix que de nous réinventer.

Pour cela, j’aurai besoin de vous car il va falloir surmonter des conservatismes et des habitudes.

Ceux qui disent que c’est impossible ont tort.

Les Français sont formidables, c’est le système qui est à bout.

Il n’y a pas que les entrepreneurs, les artisans, les médecins, les chercheurs, qui appellent à des changements et à plus de liberté pour agir.

Les centaines de fonctionnaires que j’ai pu rencontrer ressentent cette chape plomb qui bride leurs initiatives, leurs carrières. « De l’air » m’ont-ils dit !

Je n’ai pas rencontré un enseignant ou un chef d’établissement qui ne m’a pas également confié qu’il en avait assez de ne pas pouvoir être plus autonome.

Pareil pour les personnels hospitaliers, pareil pour les policiers…

Les chômeurs n’ont pas peur de la liberté, ils ont peur du statu quo.

Les jeunes des quartiers qui rêvent de réussite n’ont pas peur de la liberté, non, ils n’ont que rage pour ce conservatisme qui les englue.

Tout cela commence à faire du monde pour changer le système…

Pour tout dire, vous n’êtes pas seuls et je ne suis pas seul à vouloir bouger les choses.

Pour construire mon projet, j’ai rencontré énormément d’entrepreneurs de PME. Je ne leur ai pas dit que « je les aimais » car les mots non suivis d’effets ne sont que des mots…

Leur constat, c’est le vôtre.

Face au manque de visibilité du carnet de commande, face au fatras des normes administratives, face au poids des impôts et des cotisations, vous avez le sentiment que vous ne jouez pas à armes égales avec vos concurrents étrangers.

Vous vous sentez coincés par des règles absurdes, empêtrés par des charges fiscalo-sociales, découragés par l’instabilité législative, règlementaire et fiscale.

Tout cela aboutit à brider le potentiel de croissance de nos PME.

Notre pays est champion en termes de créations d’entreprises mais elles grandissent peu.

C’est ça que nous devons changer ensemble !

Mon projet vise, par conséquent, à déverrouiller les principaux freins à leur croissance, afin de libérer leur capacité d’emploi et d’innovation. Nous pourrons ainsi atteindre en 10 ans une densité d’entreprises de taille moyenne à mi-chemin entre le Royaume-Uni et l’Allemagne, et, pour cela, favoriser la création de 130 000 nouvelles PME de plus de 10 salariés, 20 000 de plus de 50 salariés, 5 000 de plus de 250 salariés, soit quasiment doubler leur nombre actuel.

Le contrat que je vous propose, c’est celui de la liberté, c’est celui de la responsabilité, bref c’est celui de la confiance réciproque.

C’est travailler ensemble ! Pour cela je vous propose trois objectifs.

Premier objectif, faciliter le financement de vos PME.

Cela veut dire mettre en œuvre les mesures suivantes :

Premièrement, orienter 50 Mds €, soit environ 3% des encours des contrats d’assurance-vie vers le capital des PME.

Deuxièmement, réduire l’impôt des particuliers de 30% du montant investi dans une PME, jusqu’à 1 M€ pour un couple, étalés sur 5 ans.

Troisièmement, multiplier les fonds privés d’amorçage, labélisés par BPI France et abondés par l’État.

Quatrièmement, faciliter l’ouverture du capital des PME à vos salariés sans risque de requalification en salaire ;.

Cinquièmement, surseoir aux droits de succession lors de la transmission familiale des PME, jusqu’à la cession effective de l’entreprise.

Deuxième objectif, réduire les contraintes qui pèsent sur vous.

Je parle d’abord des contraintes fiscales et sociales

Nous devons stabiliser et rendre lisible notre politique fiscale pendant cinq ans, après avoir annoncé les grandes mesures fiscales du quinquennat. Vous aurez ainsi la lisibilité nécessaire.

Je veux réduire massivement les charges sociales et fiscales qui pèsent sur vous en simplifiant et en boostant les allègements de charges.

Cela représente 35 milliards en faveur des entreprises et de la compétitivité : 25 milliards au travers d’une baisse des charges sociales et des impôts qui pèsent sur la production, et 10 milliards au travers d’une baisse de l’impôt sur les sociétés.

Par ailleurs, la suppression de l’ISF porte ces allégements à 40 milliards.

Cela représente plus que l’ensemble des dépenses de recherche et développement des entreprises (30 Md€) ou 15% de leurs dépenses d’investissement (260 Md€) : de quoi redonner un nouveau souffle à l’économie française !

Tout cela passe, soyons précis :
- par une transformation du CICE qui est un crédit d’impôt complexe, en une baisse des charges patronales pour un montant équivalent, durable, lisible, portant sur l’ensemble des salaires.
- par un renforcement des allègements existants avec un nouvel allègement de charges sociales et d’impôts de production, de 25 milliards d’euros, portant sur tous les salaires, pour redonner un nouveau souffle à l’économie française. Cet allègement montera progressivement en charge jusqu’en 2020.
- par un allègement de l’impôt sur les sociétés. Les contributions additionnelles à l’IS seront supprimées en 2018, et le taux d’IS sera diminué progressivement pour atteindre environ 25% au terme du quinquennat. Cette mesure permettra de tendre vers le taux moyen de l’Union européenne, et représente un effort de l’ordre de 10 Md€.
- par le prolongement jusqu’en 2019 du dispositif de suramortissement exceptionnel des investissements, pour favoriser l’investissement et la trésorerie des entreprises industrielles.

Cela passe également par une réforme de la fiscalité afin de favoriser la création d’emplois.

L’ISF, impôt absurde, sera supprimé dès 2018, pour garder en France des capitaux qui iront s’investir dans des entreprises françaises, et qui créeront des emplois en France.

Mieux vaut faciliter l’essor d’un capitalisme tricolore plutôt que de se rouler à terre pour séduire les capitaux étrangers. Je n’ai rien contre eux mais autant faire français si on le peut.

Les mécanismes de déduction existants qui financent les entreprises innovantes ou les fondations seront remplacés par des mécanismes de même nature sur l’impôt sur le revenu.

Je propose de mettre en place un taux unique d’imposition des revenus du patrimoine à 30% pour favoriser l’investissement dans les entreprises et donc la création d’emplois.

Parallèlement, je créerai une « TVA compétitivité » en augmentant de 2 points le taux normal, les taux réduits et super-réduits resteront inchangés, les produits de première nécessité et les services publics seront donc épargnés.

Cette TVA compétitivité permettra de financer la baisse des charges pesant sur les salaires les plus modestes.

Enfin, le plafond de versement dans un « PEA PME » sera doublé pour le porter à 150 000 euros, afin de favoriser le financement des PME et des ETI, et donc favoriser la création d’emplois.

Après les contraintes fiscales et sociales, j’en viens aux contraintes d’un droit du travail qui, aujourd’hui, est devenu illisible pour tous.

Le paradoxe, c’est que notre droit du travail actuel est à la fois un frein à l’embauche et de moins en moins protecteur des salariés.

Les entreprises ont peur d’embaucher ; les salariés peur d’être licenciés. La prudence et la défiance règnent à tous les étages.

Sortons de cette impasse !

Je m’engage à refonder et simplifier le Code du travail.

On distinguera clairement les normes sociales fondamentales qui relèvent du domaine de la loi et ce qui relève de l’accord collectif, en priorité d’entreprise ou, à défaut, je sais que vous y êtes attachés, de l’accord de branche.

Dès l’été, pour faciliter l’embauche dans les petites entreprises, je m’engage à doubler les seuils sociaux et à limiter l’impact financier du franchissement des seuils.

Il nous faut ensuite clarifier et sécuriser les règles qui régissent le contrat de travail et sa rupture.

Contraignantes pour l’employeur, peu protectrices pour les salariés, empreints d’une forte insécurité juridique, elles contribuent à rigidifier le marché du travail, à freiner les recrutements et à privilégier le recours aux CDD souvent très courts : 9 embauches sur 10 se font aujourd’hui en CDD.

La priorité doit être désormais de faciliter les recrutements dans le cadre de contrats stables.

Nous devons donc sécuriser la rupture du contrat en plafonnant, de façon impérative, les indemnités prud’homales.

Nous devons ensuite permettre aux entreprises de conforter leur compétitivité en clarifiant les règles du licenciement économiques car elles doivent s’adapter en permanence.

Nous faciliterons les recrutements dans les petites entreprises à travers une rénovation du contrat de travail. J

Je pense, en particulier, à un recours plus facile au contrat de mission ou à la mise en place d’un contrat à causes de rupture prédéfinies, ce que vous appelez le contrat de croissance.

Sur cette question du contrat de travail, je pense qu’un recours à la négociation interprofessionnelle, à partir des orientations que je viens de citer, permettra d’en fixer les contours.

J’en viens maintenant justement au dialogue social.

Je veux étendre la place accordée à la négociation collective, et cela d’abord au niveau de l’entreprise.

La règle qui sera fixée par la loi serait la suivante : une instance unique pour la représentation du personnel.

Cette instance regroupera les actuels Délégués du Personnel, Comité d’Entreprise et Comité Hygiène, Sécurité et Conditions de Travail.

Ses prérogatives et ses moyens seront croissants en fonction de l’effectif de l’entreprise. Par accord collectif, les entreprises qui le souhaitent pourront conserver des instances distinctes.

En, ce qui concerne l’adaptation des règles de la négociation collective, nous devons, comme vous le souhaitez, faire émerger une vraie démocratie sociale dans les TPE/PME.

Je vous rappelle ici mes propositions : ouvrir la possibilité du referendum, limiter les mandats syndicaux, faciliter la négociation avec les élus du personnel en l’absence de délégués syndicaux, donner la possibilité de se présenter librement au 1er tour des élections professionnelles.

J’ai demandé à Gérard Larcher dont vous connaissez le pragmatisme de me faire des propositions de mise en œuvre afin que nous puissions rénover, ensemble, les règles du dialogue social.

Il ne s’agit pas pour moi d’opposer les uns aux autres mais je veux moderniser nos règles de représentation et de négociation.

Je veux enfin, vous le savez, lever le verrou des 35 heures.

Dans cette campagne présidentielle, il me semble être le seul à vouloir le faire vraiment et clairement.

Par pour des raisons idéologiques mais tout simplement parce qu’il est temps de donner aux entrepreneurs et aux salariés le pouvoir de négocier entre eux, ce qui est bon pour eux.

Pour renouer avec la compétitivité et pour remobiliser la force de travail, je donnerai la priorité à la négociation collective pour trouver, dans l’entreprise, ou comme vous le souhaitez dans la branche si cela est nécessaire, les moyens les plus efficaces pour augmenter la durée effective du travail et en définir les contreparties salariales.

Bref, je veux du gagnant-gagnant au service de l’entreprise, de l’emploi et de la feuille de paye !

Je sais que vous partagez ma volonté de favoriser l’association des salariés à la marche de l’entreprise.

Je suis d’accord pour voir ensemble comment développer l’intéressement et la participation dans les PME de moins de 50 employés et pour celles qui ne sont pas éligibles, mettre en place une « prime de partage » plafonnée à 2 000€ et exonérée de cotisations

Vous m’avez souvent interpellé sur la complexité des règles qui vous sont imposées. Même Kafka n’aurait pu imaginer certaines d’entre-elles.

Le compte pénibilité sera supprimé !

Mon troisième objectif, c’est de vous accompagner dans votre croissance.

Je vous propose un pacte de confiance destiné à réduire les incertitudes qui pèsent sur vous, en passant du « contrôle sanction » au « contrôle conseil ».

Le poids des normes et les contraintes seront allégés en les alignant sur les normes européennes, sans sur-transposition.

BPI France doit devenir l’outil stratégique national d’investissement industriel. Il aura les moyens d’un « fonds souverain » et aura les mêmes prérogatives que l’Agence des Participations de l’État.

Je m’engage à faire de l’État, en tant que client, un moteur de croissance de vos entreprises en augmentant la part des PME françaises dans les commandes publiques.

Cela veut dire également que nous devons libérer l’innovation.

Cela veut dire :
- autoriser les expérimentations à petite échelle, selon un « Principe d’Innovation » qui se substituerait au « Principe de Précaution ».
- regrouper localement les acteurs de la recherche, de l’enseignement, de l’incubation, de l’accompagnement et du financement de start-up dans des « clusters » pour développer les synergies.
- sanctuariser le Crédit d’Impôt Recherche en développant la délivrance de rescrits fiscaux en amont.
- enfin encourager la modernisation des équipements industriels en prolongeant jusqu’à 2019 le mécanisme de « suramortissement ».

Vous accompagner dans votre croissance, c’est aussi reconnaître votre rôle en matière d’alternance et de formation professionnelle des jeunes.

Après 5 années perdues pour rénover notre système d’alternance, il n’y a plus de temps à perdre pour sortir du statu quo et, comme vous le souhaitez, faire enfin de l’alternance la voie d’accès à l’emploi des jeunes.

Nous y arriverons grâce des incitations financières stables pour les entreprises, grâce à une meilleure implication des branches dans la politique de l’apprentissage et grâce à un rapprochement des CFA et des lycées professionnels.

Ce chantier de l’apprentissage et de la formation en alternance sera pour moi un chantier prioritaire sur lequel nous avancerons avec vous et avec les régions.

Et si nous voulons que ça marche, il faut partir des besoins des entreprises et de vos propositions.

Voilà, Mesdames et Messieurs, le projet que je porte et que je vous propose de réaliser ensemble.

Ne nous racontons pas d’histoire : dette, déficits, chômage de masse, croissance médiocre, notre pays est dans une situation très difficile, que seule la politique accommodante de la BCE permet d’atténuer mais cette politique ne durera pas éternellement.

Quant à l’environnement européen et international, le moins qu’on puisse dire c’est qu’il est plus qu’incertain.

A vrai dire, le sort de notre pays dépend de nous, de notre lucidité, de notre cran, de notre imagination, de notre fierté nationale aussi.

C’est là tout l’esprit de ma démarche pour redresser notre pays. Je suis prêt à agir mais tout ne viendra pas du sommet : le sursaut français sera aussi entre vos mains.

J’ai la conviction que les entrepreneurs de France seront au rendez-vous car l’audace fait partie de leur ADN.

Merci de votre écoute.


Source : Fillon2017.fr