Jusqu'au 26 mars, le monde culturel s'engage dans la lutte contre le racisme et l'antisémitisme. Quatre événements d'une semaine de mobilisation autour d'un slogan : #Tousuniscontrelahaine.
« Alors que partout le dialogue devient plus difficile, les mots plus violents, c'est autour des propositions portées par des artistes que la discussion et le dialogue semblent encore et toujours possibles ». Cette conviction, exprimée par la ministre de la Culture et de la Communication le 17 janvier dernier devant les professionnels de la culture, trouve aujourd'hui un écho et un retentissement particuliers. Au moment où débute la Semaine d'éducation et d'actions contre le racisme et l'antisémitisme, organisée sous l'égide de la délégation interministérielle pour la lutte contre le racisme, l'antisémitisme et la haine anti-LGBT (DILCRAH), le monde culturel est bien décidé à faire entendre sa voix.
Alors que partout le dialogue devient plus difficile, les mots plus violents, c'est autour des propositions portées par des artistes que la discussion et le dialogue semblent encore et toujours possibles (Audrey Azoulay)
Le musée national de l'histoire de l'immigration fait son « Grand festival »
Renouer le dialogue, c'est toute l'ambition du « Grand festival », dont la deuxième édition se tient, comme la première, au Palais de la Porte Dorée, à Paris. Un dialogue que le musée national de l'histoire de l'immigration veut, plus que jamais, à l'image de la création : ouvert, remuant, divers, vivant. Pour cela, la programmation, résolument tournée vers la jeunesse, explore les mille et une façons de swagger face aux discriminations : du stand-up (avec le Jamel Comedy Club) au rap (avec The Hop), en passant par une séquence clubbing (avec Louise Chen) ou une sélection de films et de créations théâtrales et chorégraphiques. Le dialogue, c'est aussi les rencontres, les échanges et la participation, avec notamment un forum sur l'intégration. A ne pas manquer.
Les migrations questionnées à Metz
Pour sa part, la scène conventionnée de Metz aborde une problématique précise et brûlante, celle des migrations et des migrants. A l'heure où les migrants sont en permanence sous le feu roulant de l'actualité, il avait paru urgent à Emmanuel Darey, l'un des auteurs majeurs de la scène théâtrale française disparu brutalement le 25 janvier 2016, de solliciter quinze amateurs pour un projet d'écriture participative destiné à revenir sur la tragédie des migrants venus notamment de Syrie et d'Irak. C'est précisément le texte qui devait naître de ce travail collaboratif qui sera mis en espace et en voix mardi 21 mars par la compagnie Astrov. Qu'il le soit précisément à l'Espace portant le nom de Bernard-Marie Koltès constitue en soi tout un programme.
Le Mémorial de la Shoah se penche sur « Shoah et bande dessinée »
A Paris, le Mémorial de la Shoah, lieu de recueillement situé dans le Marais, est aussi un site très actif de recherches et d'expositions, comme en témoigne cette passionnante - et inattendue - présentation consacrée à « Shoah et bande dessinée ». Inattendue, parce qu'elle permet de découvrir l'étendue - et la diversité - des préoccupations des auteurs de BD pour la Shoah. Passionnante, parce que, outre la richesse du corpus présenté, des comics américains aux albums de Bilal, en passant par l'oeuvre majeure de Will Eisner, l'exposition dresse un inventaire aussi précis que précieux de toutes les formes de récits, qu'ils soient documentaires ou fictionnels, qu'a suscités la Shoah. Résultat : une invitation à exercer notre esprit critique, mais également notre vigilance.
Le Mémorial de Caen présente « Dessins assassins ou la corrosion antisémite »
Les images, encore. Cette fois, il ne s'agit plus de montrer la Shoah, mais ce qui y a conduit : l'antisémitisme. C'est le but que s'est assigné le Mémorial de Caen en présentant la collection réunie par Arthur Langerman, collectionneur né en 1942 dans une famille juive d'Anvers, dont les parents ont été déportés à Auschwitz : « Dessins assassins ou la corrosion antisémite ». En parcourant cette collection exceptionnelle, qui rassemble un fonds de plus de 7000 documents, affiches, journaux ou objets sur le thème de l'antisémitisme, on est saisi d'effroi. Puis on se dit qu'elle constitue paradoxalement le réquisitoire le plus implacable contre la haine antisémite. A voir absolument.
Photo: "Dans le bonheur", la sculpture monumentale de Diadji Diop devant le Palais de la Porte dorée, à Paris © Manuel Cohen / AFP