Après l'Iran, le ministre fédéral des Affaires étrangères Frank-Walter Steinmeier a poursuivi son voyage mercredi (3 février) vers Riyad : le report des pourparlers de Genève sur la Syrie montre d'autant plus nettement à quel point l'influence des puissances régionales est nécessaire pour désamorcer le conflit. Il prouve aussi l'importance de contrer une nouvelle escalade des tensions entre l'Iran et l'Arabie saoudite.
Cultiver le dialogue avec l'Arabie saoudite : c'est le mot d'ordre qui domine les entretiens politiques à Riyad mais aussi la présentation de l'Allemagne au festival saoudien Janadriyah. L'Allemagne est en effet l'invitée d'honneur de l'unique festival culturel du royaume saoudien. Un million de visiteurs sont attendus sur le parvis de la capitale durant les deux semaines de festivités. Le pavillon allemand aura pour slogan « Une tradition d'innovation » et donnera une « image vivante de notre culture », a assuré mercredi M. Steinmeier lors de son inauguration.
En compagnie du roi Salman Bin Abdulaziz, le ministre a visité les stands des champions de l'innovation allemande - entreprises et institutions - dans un décor de place du marché traditionnelle parsemée de maisons à colombages. Des expositions thématiques consacrées entre autres aux droits fondamentaux et au rôle des femmes dans les sciences occupent également une place importante dans le pavillon allemand. Le festival sera aussi l'occasion de conférences-débats et d'un programme culturel : l'objectif, aux yeux du ministre allemand des Affaires étrangères, est de dialoguer avec les visiteurs saoudiens et notamment les jeunes.
La Syrie, sujet majeur des entretiens au Moyen-Orient
M. Steinmeier a souligné que cette visite lui donnait l'occasion de parler avec son homologue saoudien mais aussi avec « l'ensemble des dirigeants politiques du pays ». Mercredi, il s'est notamment entretenu avec le roi d'Arabie saoudite et avec le vice-prince héritier et ministre de la défense, le Prince Mohamed Bin Salman Bin Abdulaziz Bin Saoud. Le conflit sanglant qui frappe la Syrie a dominé les discussions. À l'occasion de son séjour à Riyad, M. Steinmeier a fait part de sa gratitude envers l'Arabie saoudite pour avoir rassemblé l'opposition syrienne, contribué fortement à l'envoi d'une délégation à Genève et intercédé en faveur de l'adoption des principes dits de Vienne, base des négociations.
Les principes adoptés à Vienne à la fin du mois d'octobre 2015 par une vingtaine d'organisations et d'États participants, dont l'Allemagne, comprennent plusieurs éléments considérés comme essentiels : 1) La Syrie doit rester un État et une communauté où tous les groupes ethniques et religieux peuvent coexister en paix ; 2) Un cessez-le-feu et un processus de transition politique doivent être engagés dès que possible ; 3) Les attaques sur les civils doivent être arrêtées et les terroristes de l'EIIL et d'Al-Qaida doivent être combattus par tous.
Les échanges avec le ministre des Affaires étrangères Adel Al-Joubeir ont elles aussi porté sur les difficiles efforts engagés pour désamorcer le conflit : mercredi, l'envoyé spécial des Nations Unies Staffan de Mistura a annoncé la suspension, jusqu'au 25 février, des négociations de Genève entre le gouvernement et l'opposition. Le chef de la diplomatie allemande a souligné, en marge des entretiens de Riyad, que l'offensive militaire du régime sur Alep avait pesé sur les pourparlers, de même que « le manque de volonté du régime d'Assad d'ouvrir véritablement un accès humanitaire aux villes et aux villages assiégés ». Il a cependant réaffirmé :
Quoi qu'il en soit : il n'y a pas d'alternative au processus de Vienne et aux négociations de Genève en vue d'un règlement politique. C'est pourquoi les États du processus de Vienne doivent continuer à oeuvrer avec toute la détermination possible pour créer les conditions qui permettront des progrès concrets dans les négociations de Genève.
Il importe donc, a réaffirmé M. Steinmeier à Riyad, que cessent les récentes montées des tensions entre les puissances régionales que sont l'Iran et l'Arabie saoudite. Le ministre espère que les deux pays retrouveront la voie du dialogue. À l'occasion d'une conférence de presse conjointe jeudi (4 février) avec son homologue, M. Al-Joubeir, il a ajouté qu'une rencontre prochaine des ministres des Affaires étrangères en format de Vienne serait importante pour évoquer les prochaines étapes des pourparlers sur la Syrie.
Un dialogue bilatéral sur le dossier des droits de l'homme
Outre les sujets bilatéraux, M. Steinmeier a abordé des questions difficiles telles que la situation des droits de l'homme. Il a affirmé, en présence de son homologue saoudien, qu'il se réjouissait que la peine de mort prononcée contre le poète et curateur saoudien Ashraf Fayad ait été commuée en peine de prison. L'Allemagne poursuivra son dialogue avec l'Arabie saoudite sur les dossiers relatifs aux droits de l'homme. Une rencontre avec le ministre de l'Économie, Adel Al-Fakieh, et de jeunes cadres a par ailleurs été l'occasion d'évoquer les perspectives de coopération avec l'Allemagne et le renforcement des échanges et des rencontres entre les deux pays.