Annonce des mesures du plan d'économies: aucune réforme structurelle

Blog de Bernard Debré - 23/04/2014 17:05:00


Ahurissant ! C'est le mot que l'on peut utiliser après l'intervention de Manuel Valls à la suite du Conseil des ministres d'hier. Il voulait détailler le plan des 50 milliards d'euros d'économie du Pacte de compétitivité et de solidarité. Si l'on reprend ses propositions, on est sidéré par leur pauvreté. Aucune réforme de structure ne se dessine.

Prenons quelques exemples. Ainsi, l'Etat et ses agences devront faire 18 milliards d'euros d'économies (rappelons tout de même que lors de son discours de politique générale, le nouveau Premier ministre annonçait 19 milliards) : « ces économies s'appuieront sur la maîtrise des dépenses de fonctionnement des ministères. Elle passe par des économies sur les dépenses immobilières, la mutualisation des fonctions support (...), et une réduction du train de vie de l'Etat ».

L'Etat va donc continuer à vendre ses biens comme il le fait déjà depuis de nombreuses années. Mutualisation des fonctions support ? Les ministères se mettront ensemble pour acheter leurs crayons et leurs gommes. C'est une très grande réforme de l'Etat (sic) !

« Les opérateurs et autres agences de l'Etat verront leurs dépenses de fonctionnement et leurs interventions revues à la baisse. » Il existe des centaines d'agences de l'Etat dont l'utilité est relative. Pas question pour autant de les supprimer mais juste de baisser leur budget de fonctionnement. Il s'agit d'une simple coupe générale sans distinguer les agences utiles de celles qui le sont moins.

Quant aux collectivités territoriales, la suppression de la clause générale de compétence ne suffira sans doute pas à atteindre les 11 milliards d'euros annoncés. Rappelons néanmoins que cette clause avait été supprimée sous la présidence de Nicolas Sarkozy et remise en place par le Gouvernement Ayrault.

Sur les 10 milliards d'euros pour l'assurance maladie, le flou est le plus complet. « Mieux organiser les parcours de soins, en renforçant les soins de premier recours, en développant la chirurgie ambulatoire, en facilitant le retour à domicile après une hospitalisation, en améliorant le suivi des personnes âgées en risque de perte d'autonomie ».
Bien qu'utiles, ces mesures ne sont pas des sources structurelles d'économies. Par ailleurs, la chirurgie ambulatoire n'a pas attendu le gouvernement pour se développer. En 20 ans, la durée moyenne d'hospitalisation est passée de plus de 10 jours à 3,5 jours. Je vois mal comment on peut encore diminuer cette durée moyenne.

Concernant la protection sociale, on devine que les familles des classes moyennes vont encore être assommées. « Les prestations sociales ne seront pas revalorisées pendant un an ». Les bénéficiaires apprécieront...

Finalement, on remarque à l'issue de ces annonces qu'il ne s'agit nullement de réformes structurelles mais bien de simples coups de rabot.

On aurait pu imaginer revoir la durée légale du temps de travail (comme Manuel Valls l'avait lui-même proposé il y a quelques années), diminuer le nombre de fonctionnaires en remettant en place le non remplacement d'un fonctionnaire sur deux. Il fallait revenir sur l'Aide médicale d'Etat, le jour de carence des fonctionnaires. Pour les hôpitaux, il fallait diminuer leur nombre et établir des plateaux techniques plus performants. Une véritable révision générale des politiques publiques aurait été utile.

Manuel Valls va mécontenter tout le monde que ce soit son camp, mais aussi le peuple de France qui va souffrir de ces mesures sans en voir l'utilité réelle.


Pr. Bernard DEBRE
Ancien Ministre
Député de Paris